Elles sont rédigées, dans la précipitation, sur instruction directe de Hitler et adoptées à l'unanimité par les membres du Reichstag. Les trois lois sont publiées au Reichsgesetzblatt le et entrent en vigueur le jour de leur promulgation.
La loi sur la citoyenneté du Reich, mise en œuvre par un décret du , et la loi sur la protection du sang et de l'honneur allemand participent de manière essentielle à la transposition de l'antisémitismenazi dans l'appareil législatif du Troisième Reich. Elles permettent de poursuivre et d'accentuer le processus d'exclusion des Juifs de la société allemande entamé dès .
La loi du sur l’organisation du travail national (Gesetz zur Ordnung der nationalen Arbeit vom 20. Januar 1934), dite loi d’organisation du travail ou Arbeitsordnungsgesetz (AOG)[2] est une loi adoptée le par le Gouvernement du Reich dans le cadre de la Gleichschaltung et appliquant le Führerprinzip au monde de l’entreprise : elle nomme les patrons des grandes entreprises allemandes « Führer » de leur firme et interdit la grève.
En cas de conflit entre patrons et ouvriers dans une entreprise de moins de 20 salariés, la loi établit que le conflit devait être réglé par un conseil de confiance (Vertrauensrat), composé de militants nazis élus par les ouvriers de l'entreprise sur une liste dressée par le patron en accord avec la cellule nazie.
Si le désaccord subsistait, elle prévoyait qu’un administrateur du travail (Treuhänder der Arbeit), fonctionnaire gouvernemental, trancherait. Un tribunal d'honneur a été créé auprès de chaque administrateur, qui était habilité à relever les dirigeants d'usine en cas de faute grave ou d'abus de confiance[3].
Selon la loi, les dirigeants de l'usine possédaient une autorité absolue, et les employés devaient se soumettre sans poser de questions. Elle limitait considérablement la capacité et la possibilité de se plaindre et éliminait le droit des travailleurs à participer à la prise de décision[4].
Les relations du travail doivent être réglées autant que possible au sein même de l'entreprise qui rencontrera, pendant une période assez longue de transition, des difficultés aussi bien d'ordre personnel qu'économique et social. On a alors donné au commissaire du travail des moyens de régler les conditions du travail.
Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la loi sur l'ordre du travail a été abrogée par la loi sur le conseil de contrôle (Kontrollratsgesetz) no 40 du 30 novembre 1946[5].
Fondée le à Munich, présentée au congrès des juristes allemands le par Hans Frank à Leipzig, l'académie du droit allemand devient une institution publique, dont le siège est à Munich, le .
Le droit nazi a été travaillé de manière très intense par les différentes politiques de dénazification, mais il a aussi continué à exister et à contribuer au fonctionnement des tribunaux et des administrations de l'après-guerre[8],[9].
Dans ce procès, les accusés étaient seize juristes et avocats allemands. Neuf avaient été fonctionnaires du Reich au ministère de la Justice, d'autres étaient procureurs et juges de tribunaux spéciaux et tribunaux populaires du Troisième Reich. Ils étaient notamment tenus pour responsables de la mise en œuvre et la promotion de la « pureté raciale » nazie par le biais d'un programme d'eugénisme et de lois raciales.
Tous les accusés ont plaidé non coupable. Quatre ont été condamnés à la prison à vie ; quatre ont été acquittés.
Après la guerre, le droit nazi a continué à produire des effets à travers des normes restées en place, des institutions inchangées et des professionnels nazis du droit restés en fonction[11],[12].
Après la guerre, un certain nombre de normes du droit nazi ont continué à être appliquées dans les faits par les tribunaux[13],[14]. Cette situation a créé de nombreuses complexités dans la jurisprudence[15].
« Inutile d'ajouter que le fatras juridique qui en résulta, loin d'être seulement un symptôme de pédanterie ou de perfectionnisme, servit de la façon la plus efficace à donner une apparence de légalité à toute l'affaire[18]. »
Le droit nazi a donné lieu, dans l'après-guerre, à des débats et des réflexions sur l'injustice du droit, notamment autour de la formule de Radbruch[19]. Hannah Arendt a aussi réfléchi sur le rôle du droit dans le régime nazi. Progressivement, vers le tournant du XXIe siècle, de plus en plus d'auteurs ont considéré que l'ordre judiciaire et administratif nazi n'aurait rien à voir avec le vrai droit mais serait plutôt une anomie monstrueuse et exceptionnelle. Selon Marie Goupy ce déni de la nature juridique du régime nazi – qu'elle met en parallèle avec certaines critiques de l'état d'exception comme défaut seulement ponctuel de l'état de droit – est une tentative malheureuse de trancher le flou entre droit et non-droit. Pour elle, c'est précisément ces relations d'indistinction entre le droit et les autres formes de contrôle et de pouvoir au sein de la société dans son ensemble qui peuvent faire des outils juridiques des armes de domination[20].
Des débats récurrents ont également été menés sur la question de savoir si le droit nazi avait été caractérisé par des idées plus générales de courants de la dogmatique juridique. Ainsi, la responsabilité des dérives du droit nazi a tantôt été mise sur le dos du positivisme juridique, tantôt sur celui de l'anti-formalisme. Pour Raoni Bielschowski, ce ne sont pas des idéologies qui peuvent expliquer le fonctionnement de la justice sous le régime nazi, mais tout au plus les conditions matérielles d'affaiblissement des procédures de contrôle ds décisions judiciaires[21].
↑Monika Herrmann, Enzyklopädie des Nationalsozialismus, s.v. Arbeitsordnungsgesetz, p. 949.
↑Tillack-Graf, Anne-Kathleen (2014). "Work during the Time of Nazi Germany: Work for Nazi Germany". In Polkowska, Dominika (ed.). The Value of Work in Contemporary Society. Oxford. p. 169–174.
↑(en) Margarete Flöter-Durr, « Le discours de l’authenticité: de l’ensauvagement de la langue à l’anéantissement d’autrui », International Journal for the Semiotics of Law - Revue internationale de Sémiotique juridique, vol. 35, no 4, , p. 1463–1490 (ISSN0952-8059 et 1572-8722, DOI10.1007/s11196-020-09779-6, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Tomasz Giaro, « MORE BREAKING NEWS FROM NAZI TIMES », Studia Iuridica, no 95, , p. 140–149 (ISSN0137-4346 et 2544-3135, lire en ligne, consulté le )
↑(de) Joachim Perels, Das juristische Erbe des "Dritten Reiches": Beschädigungen der demokratischen Rechtsordnung, Campus Verlag, (ISBN978-3-593-36318-9, lire en ligne)
↑(de) Jörg Friedrich, Freispruch für die Nazi-Justiz: die Urteile gegen NS-Richter seit 1948 : eine Dokumentation, Rowohlt, (ISBN978-3-499-15348-8, lire en ligne)
↑Justiz und Nationalsozialismus: Kontinuität und Diskontinuität ; Fachtagung in der Justizakademie des Landes NRW, Recklinghausen am 19. und 20. November 2001, BWV Berliner Wissenschaftsverl, coll. « Juristische Zeitgeschichte Abteilung 2, Forum juristische Zeitgeschichte », (ISBN978-3-8305-0528-0, présentation en ligne)
↑Martin Bennhold, Spuren des Unrechts: Recht und Nationalsozialismus ; Beiträge zur historischen Kontinuität, Pahl-Rugenstein, coll. « Kleine Bibliothek Politik und Zeitgeschichte », (ISBN978-3-7609-1254-7)
↑(de) Maren Bedau, Entnazifizierung des Zivilrechts: die Fortgeltung von NS-Zivilrechtsnormen im Spiegel juristischer Zeitschriften aus den Jahren 1945 bis 1949, BWV, coll. « Berliner juristische Universitätsschriften », (ISBN978-3-8305-0597-6, OCLCocm57569414, présentation en ligne)
↑(de) Manuela Sonnenschein, Entnazifizierung nationalsozialistischen Arbeitsrechts: die Rechtsprechungstätigkeit nordrhein-westfälischer Arbeitsgerichte 1945-1949, Ed. Rechtskultur in der H. Gietl Verl. & Publ.-Service GmbH, coll. « Rechtskultur Wissenschaft », (ISBN978-3-86646-423-0, présentation en ligne)
↑(de) Martin Löhnig, Neue Zeiten – Altes Recht: Die Anwendung von NS-Gesetzen durch deutsche Gerichte nach 1945, Walter de Gruyter GmbH & Co KG, (ISBN978-3-11-040258-2, lire en ligne)
↑(en) Christian Joerges et Navraj Singh Ghaleigh, Darker Legacies of Law in Europe: The Shadow of National Socialism and Fascism over Europe and its Legal Traditions, Bloomsbury Publishing, (ISBN978-1-84731-167-2)
↑Hannah Arendt (trad. Anne Guérin, Michelle-Irène Brudny-de Launay, Martine Leibovici et Pierre Bouretz), Les origines du totalitarisme et Eichmann à Jérusalen, Gallimard, coll. « Quarto », (ISBN978-2-07-075804-3)
↑Clea Laage, « Die Auseinandersetzung um den Begriff des gesetzlichen Unrechts nach 1945 », Kritische Justiz, vol. 22, no 4, , p. 409–432 (ISSN0023-4834, lire en ligne, consulté le )
↑Marie Goupy, « Le non-droit, l’état d’exception et l’incertitude juridique comme outils de domination politique », Astérion. Philosophie, histoire des idées, pensée politique, no 19, (ISSN1762-6110, DOI10.4000/asterion.3683, lire en ligne, consulté le )
↑(pt) Raoni Bielschowsky, « “Von Recht zum Unrecht”: a falácia do método jurídico no (não) Direito nazifascista », Direito Público, vol. 21, no 109, (ISSN2236-1766, DOI10.11117/rdp.v21i109.7077, lire en ligne, consulté le )
(de) Michael Stolleis, Recht im Unrecht: Studien zur Rechtsgeschichte des Nationalsozialismus ; mit einem neuen Nachwort, Suhrkamp, coll. « Suhrkamp-Taschenbuch Wissenschaft », (ISBN978-3-518-28755-2, présentation en ligne)
Paru en français dans Michael Stolleis (trad. Christian E. Roques et Marie-Ange Roy), Le droit à l'ombre de la croix gammée: études sur l'histoire du droit du national-socialisme, ENS Éditions, coll. « La croisée des chemins », (ISBN978-2-84788-830-0, présentation en ligne)
(de) Joachim Rückert, Unrecht durch Recht: zur Rechtsgeschichte der NS-Zeit, Mohr Siebeck, coll. « Beiträge zur Rechtsgeschichte des 20. Jahrhunderts », (ISBN978-3-16-155929-7)
(en) Jens Meierhenrich, The Remnants of the Rechtsstaat: An Ethnography of Nazi Law, Oxford University Press, (ISBN978-0-19-881441-2)
(en) Alan E. Steinweis et Robert D. Rachlin, The Law in Nazi Germany: Ideology, Opportunism, and the Perversion of Justice, Berghahn Books, (ISBN978-0-85745-781-3)
(en) Herlinde Pauer-Studer, Justifying Injustice: Legal Theory in Nazi Germany, Cambridge University Press, (ISBN978-1-108-91635-6)
(de) Lothar Gruchmann, Justiz im Dritten Reich 1933-1940: Anpassung und Unterwerfung in der Ära Gürtner, Walter de Gruyter, (ISBN978-3-486-59547-5)
(de) Fabian Wittreck, Nationalsozialistische Rechtslehre und Naturrecht: Affinität und Aversion, Mohr Siebeck, (ISBN978-3-16-149864-0, lire en ligne)
Kaius Tuori, Empire of law: Nazi Germany, exile scholars and the battle for the future of Europe, Cambridge University Press, coll. « Cambridge studies in european law and policy », (ISBN978-1-108-48363-6)