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Malgré la crise, les jeunes diplômés gardent le moral

Cérémonie de remise de diplômes du doctorat à la Sorbonne, à Paris, en mars 2010.  AFP PHOTO BERTRAND GUAY

Les Français dépriment mais les jeunes diplômés, eux, semblent retrouver confiance. Un paradoxe car les conditions de recherche d’emploi et de travail sont pourtant toujours aussi médiocres qu’avant. Elles ont même tendance à s’aggraver selon le 4e « baromètre de l’humeur des jeunes diplômés » que le cabinet d’audit et de conseils Deloitte France a rendu public mardi 27 janvier.

Cette situation n’altère en rien le moral des mille jeunes titulaires, depuis moins de trois ans, d’un diplôme d’université ou d’écoles allant de bac à bac + 5 que l’institut de sondage Opinionway a interrogés en janvier. Depuis la création de ce baromètre, c’est même la première fois que ceux qui cherchent un emploi pensent majoritairement en trouver un dans les six mois : 51 % (60% en sortant d’un grande école) alors qu’ils étaient six sur dix à ne pas y croire il y a un an.

Ces jeunes se montrent également optimistes vis-à-vis de leur avenir professionnel : 58 % estiment qu’ils progresseront dans leur carrière. Par ailleurs, la confiance à l’égard des employeurs n’a jamais été aussi forte, même si 51 % des jeunes interrogés expriment encore de la défiance. C’est six points de moins que l’an passé. Enfin, ils sont plus nombreux à envisager leur avenir en France (79 % contre 73 % lors du baromètre 2014).

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« Précarisation croissante »

Sur certains points, la situation professionnelle des jeunes diplômés s’améliore. Ainsi, en 2014, 40 % des jeunes cherchant du travail n’avaient décroché aucun entretien. Cette année, leur part est tombée à 24 %. Par ailleurs, le taux d’emploi progresse. En 2014, 51 % des diplômés interrogés étaient en poste en entreprise. Ils sont 60 % cette année (et même 73% pour les grandes écoles).

Ces chiffres très encourageants ne doivent pas, pour autant, masquer les conditions d’emploi très difficiles pour nombre d’entre eux. « A 60 %, le taux d’emploi s’améliore, c’est vrai, se réjouit Jean-Marc Mickeler, associé et directeur des ressources humaines de Deloitte France. Mais on assiste aussi à une précarisation croissante. » De fait, ceux qui ont décroché un emploi ont signé, à 31 % (soit huit points de plus que l’an passé), un contrat à durée déterminé. Même si le phénomène est moins marqué pour les grandes écoles : un quart seulement des élèves sont en CDD.

Le travail à temps partiel a également progressé de 6 points en un an : il s’établit à 18 %. Mais là encore, sortir d’une grande école protège largement : seuls 6% de leurs anciens élèves travaillent à temps partiel.

Quant à ceux qui n’ont pas encore trouvé, le chemin reste long. En moyenne, lorsque Opinionway les a sollicités, ils cherchaient depuis vingt-deux semaines, soit autant qu’en 2014 et beaucoup plus qu’en 2013 (quinze semaines). Certes il existe une grande différence selon le niveau d’études atteint : de vingt-sept semaines (niveau bac) à dix-huit semaines (grande école), voire quinze (IUT). Depuis trois ans, la tendance est à l’aggravation : en 2013, ceux qui étaient à plus de cinq mois représentaient 21 % du total. Ils sont 33 % cette année.

Surtout lorsque l’on compare avec les pays étrangers. A côté des mille diplômés interviewés en France, l’institut de sondage a interrogé 500 jeunes expatriés, âgés de 18 à 34 ans. Ceux qui ont directement démarré leur vie professionnelle à l’international n’ont mis que sept semaines pour trouver un emploi…

« Inquiétude »

Autre élément montrant que la recherche d’emploi demeure difficile en France, le nombre de curriculum vitae envoyés. Là aussi, la situation se dégrade. En 2015, les candidats à l’emploi en ont envoyé 29 (38 en région parisienne), contre 27 en 2014 et 16 en 2013. La majorité d’entre eux confie avoir du mal à trouver des annonces qui correspondent à leur profil (54 %) et à obtenir des réponses des recruteurs (52 %).

Certes, « il y a des indicateurs positifs, c’est vrai, analyse M. Mickeler. Mais il ne faut pas en tirer des conclusions définitives. Je n’ai pas l’impression que la confiance soit revenue. Quand on rencontre des jeunes diplômés sur les forums, on sent encore une inquiétude. “Je vous laisse mon CV, mais je sais très bien que vous n’allez pas me rappeler’’, ce sont des choses que l’on entend souvent. »

Et cette confiance vis-à-vis des entreprises ? « C’était attendu, répond M. Mickeler. D’abord parce que nous faisons des efforts pour nous adapter aux nouvelles générations. Ensuite parce que le mouvement de dédiabolisation des entreprises est maintenant bien lancé. » Quant à la confiance que certains manifestent à l’idée de trouver un poste dans les six mois, M. Mickeler se dit « heureux de voir cela. Mais je ne sais pas expliquer ce qui les rend si confiants… Est-ce qu’ils vont trouver ? Rien ne permet aujourd’hui de penser qu’il y ait une vraie amélioration sur ce point… »

  • Benoît Floc'h