Quand Emmanuel Macron s’est présenté à la présidence pour la première fois en 2017, Sylvie Willot a voté pour lui. Elle aimait sa jeunesse, son dynamisme, les idées nouvelles dont il était porteur. Elle aimait aussi le fait qu’il soit originaire d’Amiens, comme elle.

“Nous étions fiers que le président soit d’ici”, commente cette aide ménagère de 57 ans. Mais aujourd’hui, Mme Willot a l’intention de voter pour le Rassemblement national – le parti d’extrême droite dont Macron a fait son ennemi juré – lors des législatives anticipées que le chef de l’État a convoquées après la cuisante défaite de son camp centriste aux élections européennes de dimanche dernier.

“J’ai été déçue par Macron”, explique-t-elle tout en chargeant ses courses dans le coffre de sa Citroën C4 grise, devant le supermarché Lidl d’un quartier populaire d’Amiens. “Il a dit que les choses allaient changer pour les travailleurs, mais rien n’a changé.” Sylvie Willot est loin d’être la seule à avoir de telles opinions dans cette région, l’équivalent français de l’Angleterre profonde. Ici, la droite populiste est de plus en plus implantée parmi des électeurs qui réclament une politique de fermeté face à l’immigration et à l’insécurité, et plus généralement le retour au principe d’autorité.

Ainsi, Florent, 51 ans, propriétaire d’un magasin de vélos à Amiens, affirme : “Il faut rétablir l’autorité à tous les niveaux. Quand j’étais jeune, on respectait les enseignants et on respectait la police. Aujourd’hui, les professeurs se font insulter par leurs élèves et les policiers se font caillasser. C’est une question d’éducation, il faut revenir aux vraies valeurs.”

Des positions très répandues dans cette petite Venise du Nord. Depuis longtemps, cette ville est représentative de l’évolution de l’électorat français. Son centre piétonnier, où les habitants aisés dîne