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Les « Shell-Keeps » ou « donjons annulaires »

[compte-rendu]

Année 1998 156-3 p. 308
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Les « Shell-Keeps » ou « donjons annulaires ».- archéologues britaniques, et plus généralement tous amateurs d'architecture seigneuriale d'outre connaissent bien le concept de « shell-keep littéralement « donjon-coquille ». Il s'agit constitués par une enceinte cuirculaire ou couronnant une motte, bordée intérieurement bâtiments résidentiels continus déterminant une intérieure également circulaire : comme le désigne terme anglais, ces enceintes sur motte jouaient autrefois rôle de tour-maîtresse, ou, suivant la imposée depuis le XIXe siècle, de « donjon ».

L'étude des textes anciens, mais aussi l'étude des archéologiques, prouvent que ces édifices tout à particuliers eurent à jouer le même rôle symbolique que tours maîtresses verticales. Christian Corvisier, qui a cette année une thèse attendue sur les tours maîtresses plan circulaire ou centré au XIe et XIIe siècles, les « donjons annulaires », tradition libre, mais très du concept anglais. La terminologie demeure hésitante sur ce domaine ; sans doute conviendra-t-il dans années à venir de préciser exactement les d'emploi du terme « donjon ».

Quoi qu'il en soit de cette terminologie, à affaire de spécialistes pusillanimes dont je suis, confrère a livré, dans cet article confié à la Société Géologie de Normandie, une contribution fondamentale à reconnaissance de sites de cette catégorie sur le continental. L'un des plus beaux exemples, conservé dans ses bases, est le « donjon annulaire » d'Argentan, Normandie. Au-dessus d'une motte tronconique, une polygonale étayée par de larges contreforts abritait en son sein une chapelle, ainsi que des résidentiels. Christian Corvisier exhibe ensuite les de Carentan (disparu, connu à partir de plans anciens), de Vatteville-la-Rue, celui de Montargis. D'autres, plus

moins ruinés, sont également cités par l'auteur, tels le château de Chars, celui de Grosley-sur-Risle, celui d'Avrilly, et tant d'autres situés dans les terres d'obédience Plantagenêt.

Mais d'autres apparaissent en dehors de ces terres : Antigny-le- Château en Côte-d'Or, La Roche-sur-Yon en Vendée, Pisany en Charente-Maritime, et d'autres encore. Christian Corvisier dévoile ainsi un nombre important de sites relevant du type décrit plus haut. Il étend son investigation, et son interprétation, à des sites tels que Gisors ou Château- Gaillard, moins évidemment rattachables au concept de base, puisqu'ils possédaient, outre l'enceinte annulaire, une tour maîtresse. Sans doute faut-il se méfier, en ce domaine, d'attributions trop hâtives à tel ou tel type : pour n'en citer qu'un seul, Château- Gaillard, tout en présentant une enceinte ovoïdale à bâtiments collés contre les courtines, n'en a pas moins été conçu comme un château à tour maîtresse verticale, celle-ci s'imposant à l'enceinte formant noyau. De telle sorte que le concept de « donjon annulaire » ne peut être appliqué à ce château insigne.

Dans son article jouant le rôle d'éclaireur par rapport à sa thèse, Christian Corvisier n'en révèle pas moins l'incontestable présence de la forme architecturale de l'enceinte annulaire sur motte, dominant le reste du château : une présence attestée avec force en Normandie, mais présente également dans le reste du territoire continental. Ses inventions et les comparaisons avec les équivalents d'outre-Manche, sont fondamentales pour une meilleure appréciation des vestiges mis au jour ; ainsi en est-il par exemple des structures primitives du château de Beynes, dans les Yvelines, sans doute mal interprétées à la suite de fouilles ou de sondages récents.

Cette véritable révélation prendra tout son sens avec la thèse, dont on espère qu'elle sera publiée rapidement. - Chr. Corvisier, « Les « shell-keeps » ou donjons annulaires, un type architectural anglo-normand ? », dans Bulletin trimestriel de la Société de Géologie de Normandie et des Amis du Muséum du Havre, t. 84, fasc. 3 et 4, 1997 (1998), p. 71-82.

Jean Mesqui.