Couverture fascicule

Isabelle Chave, Les châteaux de l'apanage d'Alençon (1350-1450). Alençon, Société historique et archéologique de l'Orne, 2003

[compte-rendu]

Année 2003 161-3 p. 264
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Isabelle CHAVE, Les châteaux de l'apanage d'Alençon (1350-1450), Alençon, Société historique et archéologique de l'Orne (Archives Départementales, 6-10 avenue de Basingstoke, 61000 Alençon), 2003, 23,7 cm, 527 p., nbr. fig. - ISSN : 0154- 0505, 35 €.

(Mémoires et documents, n°4).

Sans doute pourrait-on m'accuser de quelque parti-pris en ce qui concerne la recen- sion de ce beau livre dû à I. Chave, brillante chartiste actuellement aux archives départementales de la Somme. En effet, j'ai figuré parmi ceux qui ont officié au jury de sa thèse de l'Ecole des Chartes, et l'auteur m'a demandé d'introduire le livre qui résulte de sa thèse. Je m'y suis livré avec d'autant plus de plaisir que je lui avais conseillé de publier, le plus vite possible, cette remarquable synthèse.

Qu'on n'attende pas de ma part, dès lors, une longue et fastidieuse recension. Il me suffirait de dire qu'l. Chave a concrétisé l'attente que tous ceux qui consultent, de temps à autres, les fameuses Positions de l'Ecole des Chartes, froids sommaires de thèses qui

rissent ou, au mieux, s'empoussièrent sur des rayonnages. Sans doute doit-on beaucoup, dans cette publication, à un directeur des archives, également président de la Société historique et archéologique de l'Orne ; car voici la seconde occasion où cette société nous donne le plaisir de découvrir un ouvrage de fond renouvelant la connaissance de la construction castrale au Moyen Âge.

Je ne voudrais pas me répéter, puisque j'ai eu l'honneur de faire la préface de ce beau livre ; tout au plus dirai-je que, pour la première fois, l'historien sort ici de l'histoire des apanages les plus connus (Orléans, Bourgogne), pour pénétrer l'histoire d'un apanage moins renommé, celui des Alençon. Qui le connaît ? Peu de monde, bien que les Alençon aient été membres de la famille royale, qu'ils aient contracté des alliances remarquables ; l'apanage d'Alençon fut, aux XIVe et XV" siècles, un ensemble de possessions sans véritable homogénéité géographique, résultant de consolidations successives de châtellenies d'origine royale. Et pourtant, pourtant, malgré cette apparente hétérogénéité spatiale ou féodale, le regroupement au sein d'un apanage tenu par des princes de sang eut d'évidentes conséquences : une administration fut mise en place par ces princes pour valoriser le patrimoine, l'améliorer, voire le renouveler en fonction des impératifs du moment.

Quel plaisir, dès lors, de pénétrer dans la thèse d'I. Chave, d'évaluer avec elle les procédures mises en place par les Alençon pour valoriser ce patrimoine ; de connaître les hommes, experts en architecture ou au contraire en comptabilité, et de cerner leur parcours ; de scruter les édifices, conservés ou non, à l'aide des sources historiques, pour démêler les actions de l'un ou de l'autre.

Ainsi est-on conduit à reconnaître des sites bien peu connus jusqu'à présent. Alençon, bien sûr, dont l'auteur nous révèle les parties disparues ; mais aussi Argentan, Essay, jusqu'à ce petit manoir, charmant, de Censé, manifestement construit dans la première moitié du XIV1 siècle pour être une résidence secondaire ducale, à l'image des innombrables manoirs que construisit René d'Anjou dans la seconde moitié du XV" siècle. Pouancé, Fougères, Exmes figurèrent également parmi ces forteresses de l'apanage ; l'auteur nous fait bénéficier, à chaque fois, d'une remarquable connaissance des sources, et d'une capacité à les faire « coller » au monument.

L'ouvrage d'I. Chave aborde, de façon exhaustive, tous les aspects relatifs à la construction et à l'entretien du patrimoine castrai de l'apanage. Maîtrise d'ouvrage, maîtrise d'oeuvre, main-d'oeuvre, procédures, ressources affectées, sont passées au crible des années passantes, avec leurs aléas liés aux

guerres, tout particulièrement la guerre de Cent Ans. Il est, de surcroît, parfaitement articulé, grâce à des encadrés judicieusement disposés pour mettre en évidence des aspects particuliers. Le seul regret sera, sans doute, pour le lecteur, le caractère assez peu généreux de l'illustration. L'auteur avait montré, dans sa thèse, combien elle maîtrisait l'iconographie ancienne, mais aussi le relevé moderne. Il en demeure malheureusement bien peu au niveau de cette publication, sans doute pour des raisons budgétaires.

Quoi qu'il en soit, le livre qui. Chave a consacré à l'apanage d'Alençon demeurera un élément indispensable, tant pour les historiens que pour les archéologues. Le travail se situe dans la continuité de travaux consacrés à la maîtrise d'ouvrage et à la maîtrise d'oeuvre médiévaux développés depuis une vingtaine d'années ; mais, à se consacrer à un apanage jusqu'ici peu connu, l'auteur renouvelle totalement les connaissances acquises.

Jean Mesqui