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L’invitéMAH: le syndrome de l’enfant gâté genevois

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Votre excellent quotidien nous apprenait récemment que le musée de la Fondation Gandur pour l’art prendrait ses quartiers dans la charmante ville de Caen; la presse française s’en faisait fièrement l’écho, à l’instar du «Monde» qui y consacrait une pleine page. «C’est un grand jour pour Caen», déclarait, enthousiaste, le maire Joël Bruneau en témoignant de sa vive reconnaissance au mécène, entrepreneur et collectionneur Jean-Claude Gandur.

Si nous en sommes naturellement ravis pour la très belle cité portuaire du Calvados, c’est un véritable sentiment de gâchis qui prédomine s’agissant de Genève, à laquelle Jean-Claude Gandur entendait confier son exceptionnelle collection à la faveur d’une rénovation ambitieuse du Musée d’art et d’histoire.

Plus de huit années après son rejet dans les urnes (sous la conjonction d’une majorité hétéroclite essentiellement emmenée par la gauche dure, les Verts et quelques défenseurs du patrimoine), et alors qu’aucun clou n’a été planté, force est de constater que les habitants de la Ville de Genève se sont administré l’un de ces autogoals magistraux dont ils ont le secret, à l’exemple de la Cité de la musique ou encore de Clefs de Rive.

En effet, non seulement ils se sont privés – et avec eux les visiteurs du canton, qui ne pouvaient se manifester dans les urnes, comme nos compatriotes et touristes étrangers – du privilège d’admirer plus de 3500 pièces uniques d’une collection rare (couvrant l’archéologie grecque et romaine, mais également la peinture européenne ou l’art contemporain africain), mais en plus ils ont rejeté, avec l’arrogance qui caractérise habituellement celles et ceux qui ne paient pas un centime d’impôt, le financement de la rénovation d’un musée phare, largement garantie par des fonds privés.

Ce faisant, ils ont également enterré, avec le mépris que l’on associe souvent à une ville qui se pense globale mais se vit locale, la signature architecturale de Jean Nouvel, laquelle aurait contribué à renforcer l’attractivité de la Cité de Calvin; une destination dont les principales réalisations récentes sont le fait de contributeurs privés et courageux, que les lenteurs administratives et les écueils référendaires n’auront pas freinés dans leur remarquable volonté de faire rayonner la plus petite des grandes villes. Sachons les en remercier très sincèrement, plutôt que les vacciner à jamais de s’investir – et d’investir – pour Genève!

Quand bien même la démocratie a toujours raison, il n’est pas interdit de se demander si l’enfant gâté genevois n’a pas perdu la raison. Il aura en tous les cas raison de mettre le cap sur Caen pour y humer les embruns normands et y visiter un musée qui s’annonce iconique, présenter ses excuses à ce mécène si inélégamment éconduit et méditer sur l’état de son musée d’art (en attendant la prochaine décennie pour qu’une indispensable rénovation soit enfin réalisée, aux frais du contribuable naturellement). Mais les Genevois de la Ville ont toujours raison, n’est-ce pas?

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