Inde etc./�tats-Unis: l'affaire �crevettes-tortues�
Plainte
d�pos�e par l'Inde, la Malaisie, le Pakistan et la
Tha�lande contre les �tats-Unis. Les rapports du Groupe
sp�cial et de l'Organe d'appel ont �t� adopt�s en
1998.
�... Nous n'avons pas d�cid� que les nations
souveraines qui sont Membres de l'OMC ne peuvent pas adopter de mesures
efficaces pour prot�ger les esp�ces menac�es telles que les tortues
marines. Il est �vident qu'elles le peuvent et qu'elles le doivent. ...�
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�tats-Unis � Prohibition � l'importation de certaines crevettes et de certains produits � base de crevettes
Diff�rends n� 58 (et 61) de l'OMC. D�cision adopt�e le 6 novembre 1998
�
ce jour, sept esp�ces de tortues marines ont �t�
identifi�es. On les trouve dans le monde entier, dans
les zones subtropicales et tropicales. Elles passent leur
vie en mer ou elles se d�placent entre leurs aires
d'alimentation et leurs aires de ponte.
Les activit�s humaines ont mis en danger les tortues
marines, soit directement (ces animaux ont �t� chass�s
pour leur viande, leur carapace et leurs ufs), soit
indirectement (captures accidentelles dans les p�ches,
destruction de leur habitat, pollution des oc�ans).
Au d�but de 1997, l'Inde, la Malaisie, le Pakistan et la
Tha�lande ont d�pos� conjointement une plainte au
sujet de l'interdiction d'importer des crevettes et des
produits � base de crevettes impos�e par les
�tats-Unis. La protection des tortues marines �tait la
raison d'�tre de l'interdiction.
La Loi de 1973 des �tats-Unis sur les esp�ces menac�es
d'extinction classe les cinq esp�ces de tortues marines
que l'on trouve dans les eaux des �tats-Unis et interdit
leur �prise� sur le territoire des �tats-Unis,
dans ses eaux territoriales et en haute mer
(�prise� s'entend du harc�lement, de la
chasse, de la capture, de l'abattage ou des tentatives de
harc�lement, chasse, capture ou abattage).
En application de cette loi, les �tats-Unis ont exig�
des crevettiers nationaux qu'ils installent sur leurs
filets des �dispositifs d'exclusion des
tortues� (DET) quand ils p�chent dans des zones o�
la probabilit� de rencontrer des tortues marines est
�lev�e.
L'article 609 de la Loi g�n�rale n� 101-102, adopt�e
par les �tats-Unis en 1989, s'appliquait aux
importations. Elle pr�voyait, entre autres dispositions,
que les crevettes p�ch�es avec des moyens
technologiques susceptibles de nuire � certaines tortues
marines ne peuvent �tre import�es aux �tats-Unis
� � moins qu'il ne soit certifi� que le pays
concern� a un programme de r�glementations et un taux
de prises accidentelles comparable � ceux des
�tats-Unis, ou que son environnement halieutique
particulier ne menace pas les tortues marines.
Dans la pratique, les pays qui avaient une des cinq
esp�ces de tortues marines concern�es dans la zone
relevant de leur juridiction, et qui p�chaient la
crevette avec des moyens m�caniques, �taient tenus
d'imposer � leurs p�cheurs des prescriptions
comparables � celles que devaient respecter les
crevettiers des �tats-Unis s'ils voulaient �tre
certifi�s et exporter des produits � base de crevettes
vers les �tats-Unis � � savoir essentiellement
l'utilisation de DET en permanence.
L'importance de la d�cision de l'Organe d'appel dans
cette affaire n'a pas toujours �t� bien comprise.
Dans son rapport,
l'Organe d'appel a clairement dit qu'au titre des r�gles
de l'OMC, les pays ont le droit de prendre des mesures
commerciales pour prot�ger l'environnement (en
particulier la sant� des personnes, des animaux ou la
pr�servation des v�g�taux) ainsi que les esp�ces en
voie d'extinction et les ressources �puisables. Il ne
revient pas � l'OMC de leur �accorder� ce
droit.
L'Organe d'appel a �galement dit que les mesures visant
� prot�ger les tortues marines seraient l�gitimes au
regard de l'article
XX du GATT,
qui �nonce diverses exceptions aux r�gles commerciales
normales de l'OMC, sous r�serve que certains crit�res,
notamment la non-discrimination, soient respect�s.
Les �tats-Unis n'ont pas eu gain de cause dans cette
affaire, non pas parce qu'ils tentaient de prot�ger
l'environnement, mais parce qu'ils �tablissaient une
discrimination entre les Membres de l'OMC. Ils
accordaient aux pays de l'h�misph�re occidental �
essentiellement dans les Cara�bes � une assistance
technique et financi�re et des d�lais de transition
plus longs pour que leurs p�cheurs se mettent �
utiliser des dispositifs d'exclusion des tortues.
Ils n'accordaient cependant pas les m�mes avantages aux
quatre pays d'Asie (Inde, Malaisie, Pakistan et
Tha�lande) qui ont port� plainte devant l'OMC.
La d�cision a �galement fait valoir que les groupes
sp�ciaux de l'OMC peuvent accepter des
�interventions d�sint�ress�es� (amicus
briefs) d'ONG ou d'autres parties concern�es.
Le
Groupe
sp�cial
a estim� que l'interdiction impos�e par les
�tats-Unis �tait incompatible avec l'article
XI du GATT
(qui limite le recours aux interdictions ou
restrictions � l'importation) et ne pouvait pas
�tre justifi�e au regard de l'article
XX du GATT
(qui traite des exceptions g�n�rales aux
r�gles, y compris pour certaines raisons se
rapportant � l'environnement).
� l'issue de la proc�dure d'appel, l'Organe
d'appel a conclu
que la mesure incrimin�e pouvait faire l'objet
de la justification provisoire pr�vue par l'article
XX g),
mais ne satisfaisait pas aux prescriptions
�nonc�es dans le
texte introductif de l'article XX
(qui pr�cise quand les exceptions g�n�rales
peuvent �tre invoqu�es).
L'Organe d'appel a donc conclu que la mesure
prise par les �tats-Unis n'�tait pas justifi�e
au regard de l'article XX du GATT (�
proprement parler, du �GATT de 1994�,
� savoir la version en vigueur de l'Accord
g�n�ral sur les tarifs douaniers et le commerce
telle que modifi�e par l'Accord conclu en 1994
� l'issue du Cycle d'Uruguay).
Ce qu'a dit l'Organe d'appel:
"185.
En formulant ces conclusions, nous tenons �
insister sur ce que nous n'avons pas
d�cid� dans cet appel. Nous n'avons pas
d�cid� que la protection et la pr�servation de
l'environnement n'ont pas d'importance pour les
Membres de l'OMC. Il est �vident qu'elles en
ont. Nous n'avons pas d�cid� que les
nations souveraines qui sont Membres de l'OMC ne
peuvent pas adopter de mesures efficaces pour
prot�ger les esp�ces menac�es telles que les
tortues marines. Il est �vident qu'elles le
peuvent et qu'elles le doivent. Et nous n'avons
pas d�cid� que les �tats souverains ne
devraient pas agir de concert aux plans
bilat�ral, plurilat�ral ou multilat�ral, soit
dans le cadre de l'OMC, soit dans celui d'autres
organismes internationaux, pour prot�ger les
esp�ces menac�es ou prot�ger d'une autre
fa�on l'environnement. Il est �vident qu'ils le
doivent et qu'ils le font.
186. Ce que nous avons d�cid� dans cet
appel, c'est tout simplement ceci: bien que la
mesure prise par les �tats-Unis qui fait l'objet
de cet appel serve un objectif environnemental
reconnu comme l�gitime en vertu du paragraphe g)
de l'article XX du GATT de 1994, elle a �t�
appliqu�e par les �tats-Unis de fa�on �
constituer une discrimination arbitraire et
injustifiable entre les Membres de l'OMC, ce qui
est contraire aux prescriptions du texte
introductif de l'article XX. Pour toutes les
raisons sp�cifiques indiqu�es dans le pr�sent
rapport, cette mesure ne peut b�n�ficier de
l'exemption que l'article XX du GATT de 1994
pr�voit pour les mesures qui servent certains
objectifs environnementaux reconnus et l�gitimes
mais qui, en m�me temps, ne sont pas appliqu�es
de fa�on � constituer soit un moyen de
discrimination arbitraire ou injustifiable entre
les pays o� les m�mes conditions existent, soit
une restriction d�guis�e au commerce
international. Comme nous l'avons soulign� dans
l'affaire �tats-Unis � Essence
[Rapport adopt� le 20 mai 1996, WT/DS2/AB/R/,
page 33], les Membres de l'OMC sont libres
d'adopter leurs propres politiques visant �
prot�ger l'environnement pour autant que, ce
faisant, ils s'acquittent de leurs obligations et
respectent les droits que les autres Membres
tiennent de l'Accord sur l'OMC."