Si les journalistes bénéficient d’un environnement favorable, ils sont confrontés à une hausse des violences et des agressions verbales. Des projets de loi menacent la protection des sources, l’accès à l’information est fragmenté et le pluralisme médiatique a perdu du terrain.
Paysage médiatique
Depuis les années 1990 et pour des raisons économiques, le pluralisme des médias a diminué, notamment dans les journaux locaux. Le plus grand tabloïd, Bild, a perdu une grande partie de son lectorat, ce qui est moins le cas des publications de qualité telles que Süddeutsche Zeitung (gauche libérale) ou du conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung, dont les versions en ligne gagnent en popularité. Le secteur audiovisuel comprend des diffuseurs privés et publics, ces derniers (ARD, ZDF, Deutschlandfunk) émettant aux niveaux régional, national et international.
Contexte politique
Le rôle des médias en tant que piliers de la démocratie est largement accepté au sein de la classe politique, à l’exception de l’extrême droite. Les médias allemands entretiennent la longue tradition qui consiste à critiquer à la fois le gouvernement et l’opposition, la plupart des journaux ayant une ligne éditoriale proche d’un des camps politiques. Dans l’audiovisuel, le journalisme politique est dominé par les chaînes et stations publiques, dont l’indépendance est protégée par la législation, bien que certaines décisions concernant les employés soulèvent des soupçons d'influence politique.
Cadre légal
De solides garanties constitutionnelles et un système judiciaire indépendant composent un environnement favorable, mais les lois sur l’accès à l’information sont insuffisantes au regard des normes internationales. En outre, certains hauts fonctionnaires et législateurs œuvrent en faveur de l’adoption de lois de haute sécurité pour criminaliser l’utilisation de fuites de données, ou permettre au service de renseignement allemand de pirater des appareils ou d’intercepter des communications cryptées sans contrôle judiciaire. Les bonnes pratiques journalistiques sont encouragées par le Conseil allemand d’autorégulation de la presse, habilité à émettre des résolutions mais pas à imposer des sanctions.
Contexte économique
Nombre de médias allemands rencontrent des difficultés financières, une tendance qui s’est accentuée avec la baisse des revenus publicitaires lors de la pandémie, et le paysage affiche une assez forte concentration. Alors qu’internet et les médias sociaux ont ouvert de nouveaux horizons, abordables pour le journalisme indépendant, la diffusion en direct nécessite toujours une licence. Pour intimider la presse, les grandes entreprises recourent souvent aux procédures-bâillons (SLAPPs). Des cas d’annonceurs exerçant une influence sur le contenu journalistique ont été dénoncés par le Conseil de la presse.
Contexte socioculturel
Les journalistes femmes, les journalistes de couleur et ceux couvrant des sujets liés au genre et au racisme sont la cible d’une hostilité croissante sur les réseaux sociaux. Les reporters sont également de plus en plus taxés d’indulgence envers le gouvernement par les détracteurs des mesures anti-Covid. Les politiciens populistes tentent de générer une défiance envers les médias.
Sécurité
Les journalistes sont de plus en plus souvent la cible de menaces, de harcèlement et d’agressions physiques – des violations généralement imputables à des acteurs de l’extrême droite, mais aussi à des membres de l’extrême gauche et de la police. Les années 2020 et 2021 ont été particulièrement violentes, notamment lors des manifestations contre les restrictions liées à la Covid, où des douzaines de journalistes ont été attaqués. Les violences physiques donnent régulièrement lieu à des poursuites, alors que le cyberharcèlement reste généralement impuni. Il est arrivé que des journalistes couvrant des manifestations aient été arrêtés.