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En Suisse, un ex-ministre gambien condamné à vingt ans de prison pour crimes contre l’humanité

Arrêté en janvier 2017, Ousman Sonko, 55 ans, a été reconnu coupables de tortures, viols et assassinats sous le régime de Yahya Jammeh (1994-2016).

Le Monde avec AFP

Publié le 15 mai 2024 à 12h39, modifié le 15 mai 2024 à 13h49

Temps de Lecture 2 min.

Des plaignants posent devant le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone, en Suisse, pendant le procès de l’ancien ministre de l’intérieur gambien Ousman Sonko, le 8 janvier 2024.

La justice suisse a condamné un ancien ministre de l’intérieur gambien à vingt ans de prison, mercredi 15 mai, pour divers crimes contre l’humanité sous le régime de l’ex-président Yahya Jammeh. « Ousman Sonko est condamné à une peine privative de liberté de vingt ans », a déclaré la greffière du Tribunal pénal fédéral à Bellinzone, dans le sud-est de la Suisse. Il a la possibilité de faire appel devant ce même tribunal.

Le parquet fédéral avait requis la réclusion à perpétuité contre M. Sonko, 55 ans, lui reprochant divers crimes contre l’humanité entre 2000 et 2016. A l’issue du procès, qui s’est déroulé de janvier à mars, la défense a plaidé l’acquittement, réclamant une compensation financière pour les années en détention. Pendant le procès, le parquet fédéral et les parties civiles ont expliqué pourquoi ils considéraient l’ancien ministre comme responsable notamment de tortures, viols et assassinats.

A l’origine de la procédure, Trial International « a observé un grand soulagement du côté des parties plaignantes d’avoir été présentes, de pouvoir se confronter à Ousman Sonko et de voir comment il réagissait à ce qu’elles disaient », a signalé à l’Agence France-Presse (AFP) le conseiller juridique de l’ONG, Benoît Meystre. « Certaines nous ont aussi confié que le rôle qu’elles ont joué dans le procès participe à leur guérison, indépendamment du verdict qui sera rendu. »

Les avocates des victimes ont expliqué pendant le procès comment il ne faisait aucun doute, selon elles, que M. Sonko faisait partie du premier cercle de l’ex-président Yahya Jammeh, du début jusqu’à la fin ou presque de son règne (1994-2016), et qu’il a pleinement soutenu les mesures répressives de son régime. Le parquet fédéral l’a accusé d’avoir agi dans l’exercice de ses fonctions, d’abord en tant que membre de l’armée, puis en tant qu’inspecteur général de la police et enfin comme ministre. Il avait été arrêté le 26 janvier 2017 en Suisse, où il avait demandé l’asile après avoir été démis de ses fonctions ministérielles, qu’il a occupées pendant dix ans, jusqu’en septembre 2016.

Compétence universelle

C’est la première fois en Suisse que la notion de crime contre l’humanité – des crimes commis dans le cadre d’une attaque de grande ampleur visant des civils – était abordée en première instance. La défense a cependant plaidé que les conditions du crime contre l’humanité n’étaient pas remplies et que les faits retenus par le parquet étaient des actes isolés dans lesquels l’ex-ministre de l’intérieur ne porte aucune responsabilité.

« Il n’y a pas de caractère systématique et le petit nombre de victimes, pour chaque épisode pris séparément comme au total, n’atteint pas le seuil requis pour considérer que ce puisse être une attaque généralisée », a précisé à l’AFP son avocat, Philippe Currat. En outre, a-t-il insisté, « nous avons démontré que les exactions commises au détriment des victimes ne sont pas imputables à Ousman Sonko mais à la NIA [Agence nationale de renseignements] et aux Junglers [groupe paramilitaire], qui n’ont jamais été ni sous son autorité ni sous son contrôle effectif ».

La défense estime aussi que certains éléments de l’acte d’accusation échappent à la législation suisse car ils sont antérieurs à 2011, date depuis laquelle la Suisse se reconnaît une compétence universelle pour juger certains crimes graves en vertu du droit international. C’est également en 2011 que les crimes contre l’humanité ont été inscrits dans le droit suisse.

Ce procès « va donner un nouvel élan aux efforts déployés en Gambie pour poursuivre les crimes les plus graves du régime de Yahya Jammeh, des efforts qui, après un long retard, s’accélèrent enfin », a commenté Reed Brody, un avocat de la Commission internationale des juristes qui travaille avec les victimes de Jammeh et qui a suivi le procès.

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Le gouvernement gambien a endossé en 2022 les recommandations d’une commission qui s’est penchée sur les atrocités perpétrées sous l’ère Jammeh. Les autorités ont accepté de poursuivre soixante-dix personnes, dont M. Jammeh, parti en exil en Guinée équatoriale en janvier 2017. En avril, le Parlement gambien a voté deux projets de loi visant à créer le bureau du procureur spécial chargé de poursuivre les cas identifiés par la commission et prévoyant un tribunal spécial.

Le Monde avec AFP

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