Ce pouvait être un monstre – le pantin priapique du Casanova (1976) de Federico Fellini, le contremaître fasciste et sadique du 1900 de Bernardo Bertolucci (1976) – ou un homme brisé qui force l’empathie – par deux fois il a joué des pères qui voient mourir leur enfant, dans Don’t Look Now (Ne vous retournez pas, pour le titre en français), de Nicolas Roeg (1973), et dans Ordinary People (Des gens comme les autres), de Robert Redford (1980). Avec ses paupières tombantes, son interminable lèvre supérieure, c’était aussi le contraire d’un jeune premier.
Pourtant, Donald Sutherland a marqué le cinéma de la fin du XXe siècle comme peu d’acteurs, tournant aussi bien avec le Français Claude Chabrol qu’avec l’Américain John Landis, s’illustrant dans des superproductions hollywoodiennes (Alerte !, de Wolfgang Petersen, en 1995, le cycle de Hunger Games, entre 2012 et 2015) que dans des films d’auteur (Une saison blanche et sèche, d’Euzhan Palcy, en 1989, The Burnt Orange Heresy, au côté de Mick Jagger, en 2019). L’acteur canadien est mort, jeudi 20 juin, à Miami (Floride), des suites « d’une longue maladie », a annoncé sur les réseaux sociaux, son fils, l’acteur Kiefer Sutherland. Il avait 88 ans.
Donald Sutherland est né le 17 juillet 1935 à Saint-John, dans la province canadienne du Nouveau-Brunswick où son père est commerçant. Il quitte la côte atlantique du Canada pour Toronto où il suit un double cursus d’ingénieur et de comédien. Cette seconde vocation finit par l’emporter et en 1957. Il part alors pour le Royaume-Uni où il s’inscrit à la London Academy of Music and Dramatic Arts. Comme son physique singulier l’y prédestinait, il fait ses débuts dans le cinéma de genre, tournant des films d’horreur pour la compagnie britannique Hammer et apparaissant dans quelques séries télévisées.
En 1967, Sutherland décroche son premier rôle d’importance, dans Les Douze Salopards, de Robert Aldrich, aux côtés de Charles Bronson et Lee Marvin. L’énorme succès du film l’incite à partir pour Hollywood où il décroche un rôle dans une comédie militaire, De l’or pour les braves (1970), de Brian G. Hutton, avec Clint Eastwood et Telly Savalas. Pendant le tournage en Yougoslavie, il contracte une méningite qui le plonge dans le coma.
Vient ensuite un film aux antipodes de l’orgie belliqueuse d’Aldrich : M.A.S.H., de Robert Altman (1970). Dans le rôle du chirurgien militaire Benjamin Franklin « Hawkeye » Pierce qui tente, à force d’humour et de compassion, de survivre à la guerre de Corée, l’acteur irradie une chaleur et un pouvoir de séduction alors inattendus. Son rôle sera ensuite repris par Alan Alda dans la série télévisée inspirée du film.
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