Un sentiment nouveau d’inquiétude générale a plané, mercredi 15 mars, sur la place financière suisse, gagnant rapidement toute l’Europe, au fur et à mesure que le cours de l’action de la banque Credit Suisse enfonçait de nouveaux planchers.
« Jusqu’alors, les banques suisses étaient synonymes de risque zéro. On leur faisait confiance les yeux fermés. Avec les difficultés de Credit Suisse, cette notion n’a plus lieu d’être et c’est en soi un vrai tournant », résume un analyste financier genevois, qui préfère garder l’anonymat. Le titre de la deuxième banque helvétique a enregistré en séance la pire chute de son histoire, à la Bourse de Zurich, clôturant en baisse de 24,24 % à 1,697 franc suisse (1,73 euro), après un mouvement de panique et un échange frénétique de près de 500 millions de titres.
Déclencheur du séisme, une prise de position anodine du premier actionnaire de Credit Suisse, la Banque nationale d’Arabie saoudite (SNB). Il aura suffi d’une phrase prononcée par Ammar Al-Khudairy, le président de la SNB, pour provoquer la curée. « Nous excluons d’injecter davantage de fonds », a-t-il déclaré à Bloomberg TV, alors qu’on lui demandait jusqu’où les Saoudiens étaient prêts à soutenir la banque sise à Zurich.
En octobre 2022, ces derniers avaient pris une participation de 9,8 % pour un coût de 1,5 milliard de francs suisses, volant au secours de l’établissement helvétique alors en pleine recapitalisation après une éprouvante série de scandales financiers internationaux (Greensill, Archegos, affaires d’espionnage interne).
Avec la baisse continue en Bourse ces dernières semaines, et avant le plongeon de mercredi, ce bloc d’actions avait déjà perdu un tiers de sa valeur, et l’investisseur saoudien entend désormais limiter les frais. Il n’en fallait pas plus pour qu’enflent les rumeurs du marché faisant déjà de Credit Suisse le prochain Lehman Brothers, la banque d’affaires de Wall Street dont la faillite, en septembre 2008, avait déclenché la crise financière mondiale.
« Too big to fail »
Soucieux de calmer l’inquiétude internationale croissante, les deux organes helvétiques de régulation sont sortis de leur torpeur, mercredi soir, pour publier – en dehors des horaires de bureaux, chose rarissime dans la Confédération et preuve que l’affaire est assez grave –, un communiqué commun en forme de coupe-feu.
La Banque nationale suisse (BNS) et le « gendarme » des marchés financier Finma ont déclaré que « Credit Suisse [satisfaisait] aux exigences en matière de capitalisation et de liquidités applicables aux banques d’importance systémique ». Dans la nuit de mercredi à jeudi, Credit Suisse a néanmoins annoncé un emprunt de 50 milliards de francs à la BNS. La banque a, parallèlement, évoqué une série d’opérations de rachat de dette pour environ 3 milliards de francs suisses.
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