Une appétissante odeur de pain chaud s’échappe d’un four artisanal planté à côté d’une habitation, en pleine campagne. Fabienne Veillon, taille de guêpe et chemisier en soie, attrape les miches que lui tend une jeune femme tout en prenant de ses nouvelles, puis remonte dans sa voiture. « Elle est formidable, commente-t-elle de sa voix fluette, admirative. Elle est paysanne et boulangère, elle sème et récolte des graines anciennes, elle moud elle-même sa farine et pétrit sa pâte à la main. Son pain est excellent, je le sers à mes hôtes au petit déjeuner. »
Cette amatrice de produits en circuit court tient huit chambres d’hôte au Domaine de la Partoucie, sur la commune de Confolens, en Charente limousine. « Le domaine est dans la famille de mon mari depuis 1910. Nous l’avons repris il y a vingt ans. » Avec son époux, Michel, et leurs triplés, aujourd’hui trentenaires, ils œuvrent de concert pour faire vivre le domaine. Dans ce territoire rural, les routes bordées de pâturages et de chênes mènent à des châteaux, pimpants ou en ruine, et à des bourgs silencieux ornés de splendides églises romanes et quelques maisons à colombages. Un étang au loin et des troupeaux de moutons annoncent l’entrée du domaine de 16 hectares.
Le donjon, les tours d’angle et le pont-levis du château fortifié du XVe siècle ont disparu. Et les principaux édifices de l’ancienne seigneurie ont été modernisés au fil du temps. La grande demeure fut reconstruite en granit au XVIIIe siècle. Une glycine généreuse en habille la façade. L’aile est, qui abritait des écuries chancelantes, a été rénovée dans un style contemporain. Et le pigeonnier, lui, a été transformé en suite familiale avec kitchenette. Le parc, inspiré des jardins à la française, avec ses allées et ses buissons taillés en boule, s’étend après les douves, remplies d’eau grâce à un ruisseau qui les relie à l’étang.
Selle Hermès, animaux empaillés
Dans le bâtiment principal, le charme d’antan a été conservé, des meubles de famille aux animaux empaillés, en passant par la selle Hermès héritée du grand-père cavalier à Saint-Cyr. Devant le piano du salon, Fabienne Veillon confie : « Le compositeur Jules Massenet [1842-1912] a séjourné entre ces murs. Il fut l’amant d’une aïeule de mon mari », précise la maîtresse de maison, en épluchant des pommes pour un crumble destiné à ses hôtes, alors que l’on entend au loin les moutons bêler et les oiseaux chanter.
Plus tard, pendant la seconde guerre mondiale, des juifs y ont trouvé refuge. Les anciennes écuries, elles, sont parées d’une décoration dans l’air du temps, avec une cuisine dernier cri, une verrière et un mur orné d’un papier peint paysage. Autour de la grande table, on repère les célèbres fauteuils Le Corbusier en châtaignier, fabriqués dans l’atelier du vannier Pascal Raffier, à quelques dizaines de kilomètres de là. A l’étage, les fenêtres à meneaux du Moyen Age ont été reproduites à l’identique. Au total, quatorze ouvertures supplémentaires ont été créées pour faire entrer la lumière.
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