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Mélanie Fabre, historienne : « Le féminisme des “hussardes noires” est le produit des obstacles qu’elles ont rencontrés sur la voie de l’émancipation »

Dans « Hussardes noires : des enseignantes à l’avant-garde des luttes », la spécialiste des questions d’éducation et de genre retrace la naissance de l’intellectuelle à la Belle Epoque à travers le parcours de quatre femmes. Un passionnant essai de micro-histoire sur le premier féminisme français, qu’elle évoque dans un entretien au « Monde ».

Propos recueillis par 

Publié le 29 mars 2024 à 08h00, modifié le 29 mars 2024 à 08h35

Temps de Lecture 6 min.

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Une affiche pour le journal féministe « La Fronde », illustration de Clémentine-Hélène Dufau (1898).

« Hussardes noires : des enseignantes à l’avant-garde des luttes ». De l’affaire Dreyfus à la Grande Guerre, de Mélanie Fabre, Agone, « Mémoires sociales », 432 p., 23 €, numérique 18 €.

Spécialiste des questions d’éducation et de genre, l’historienne ­Mélanie Fabre signe aux éditions Agone une passionnante étude intitulée Hussardes noires : des enseignantes à l’avant-garde des luttes. Issu d’une thèse de doctorat, centré sur la période qui va de l’affaire Dreyfus à la Grande Guerre, cet essai de micro-histoire jette une lumière vivace sur la « première vague » du féminisme français. Adossé à un considérable travail de documentation (revues, correspondances, comptes rendus d’inspection…), il retrace l’itinéraire de quatre femmes qui ont pu bâtir leur combat émancipateur grâce aux places qu’elles avaient conquises au sein de l’institution scolaire : Marie Baertschi, Jeanne Desparmet-Ruello, Albertine Eidenschenk et Pauline ­Kergomard.

Chacune à sa manière, ces figures ont envisagé l’école à la fois comme le cœur de leur espérance et comme « l’endroit ­désigné pour faire la démocratie », selon l’expression de Pauline Kergomard. Raconter la naissance de l’intellectuelle, comme le fait Mélanie Fabre, c’est non seulement revenir sur les failles d’une IIIe République qui prive les femmes de leurs droits politiques, mais c’est aussi exhiber un moment où l’engagement féministe se confondait largement avec le combat scolaire et la lutte pour la laïcité. C’est enfin combler les lacunes d’une historiographie qui a souvent évacué le fait que, pour remporter ces combats vitaux, la République se reposa au moins autant sur ses institutrices que sur ses instituteurs, ces fameux « hussards noirs » jadis salués par Charles Péguy.

Peut-on dire que la révolution ­féministe, au tournant du XXe siècle, est une révolution scolaire ?

En partie, oui. Les lois scolaires des années 1880 offrent des perspectives de carrière à des femmes jusque-là reléguées à des postes subalternes. Elles acquièrent alors une forme de légitimité dans le ­débat public, écrivent dans les journaux, développent des réseaux intellectuels… Toujours privées de droits politiques, ­elles s’emparent des élections professionnelles, se font représenter au ministère. Utilisant les outils démocratiques dont elles restent exclues sur le papier, ­elles outrepassent la seule mission de ­républicanisation qu’on leur a confiée.

Leur engagement féministe naît avec la prise de conscience des discriminations dont elles font l’objet. Elles partagent un même espoir fondamental dans la capacité de l’école à changer la société. D’où les revendications autour de la mixité, de l’ouverture des études supérieures pour les filles, ou encore des enjeux d’édu­cation sexuelle. Finalement, leur féminisme est le produit des obstacles qu’elles rencontrent sur la voie de l’émancipation.

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